Agression, accident, maladie, attentat, perte, rupture, situation de harcèlement, maltraitance....
On ne peut pas établir une liste exhaustive de tout ce qui peut nous être potentiellement traumatisant.
Il y a bien sur la violence de la situation vécue, son caractère brutal, inattendu. Il y a également l'installation d'une violence sourde et continue dans la durée comme pour les situations de harcèlement ou de maltraitance...
Outre la violence en tant que telle, nous n'allons pas être tous frappés par les mêmes choses, ni pour les mêmes "raisons" car cela dépend également de notre complexion psychique personnelle et de notre histoire singulière.
En effet, le traumatisme n'est pas seulement l’événement en lui même, il est aussi et surtout l'effraction psychique qu'il produit.
Que voulons-nous dire par l'effraction psychique ?
L’événement est tellement violent, sa survenue brutale, inattendue qu'il fait irruption en nous et déborde nos capacités psychiques. Cela veut dire que nous ne pouvons pas le "digérer", le "métaboliser". Nous ne pouvons rien en faire, ni arriver à y penser, ni même parfois le reconstruire dans notre esprit pour commencer à l'appréhender et à le supporter. Au lieu de pouvoir être absorbé par nos capacités psychiques, il les a envahit. Il reste à l'état "brut" pour nous, à l'état sensoriel et émotionnel. Il nous hante.
Alors apparaissent bon nombre de symptômes qui en sont les effets : flash sous forme d'images fixes ou de morceaux de séquence, reviviscences comme si on était toujours plongé à cet instant, état d'hypervigilance (on est sur le qui-vive attentif à tous bruits à tous signes ce qui épuise), on ne parvient plus à se relâcher à se reposer, le sommeil devient difficile voire impossible, des angoisses peuvent se réveiller, un sentiment de persécution même...
A cet envahissement sensoriel s'adjoignent toutes les pensées imaginaires qu'on a associées inconsciemment à l’événement qui a fait traumatisme : des pensées qui ont à voir avec nos théories, nos angoisses et nos peurs d'enfant. Auparavant ces peurs, ces angoisses ou ces narrations sommeillaient en nous, l’événement est venu leur donner consistance et les réveiller. Cela se passe comme si la survenue de l'événement venait "vérifier" en quelque sorte ces pensées enfouies et les rendre réelles à nos yeux. Nous plongeant dans un état d'angoisse, d’effondrement dépressif ou de colère en réaction, déstabilisant nos repères et nos constructions, déstabilisant jusqu'à notre identité pour les personnes les plus fragiles.
N'oublions-pas toutes les émotions et les sentiments sur nous-même que cela a fait naître et qui touchent à notre image : ce qui a détérioré notre image ou notre estime de nous-même ; Ce que l'on croyait connaitre de soi et que l'on a découvert tout autre , les réactions ou les pensées inattendues dans l'urgence et la peur, les sentiments de culpabilité ; Les sentiments d'impuissance auxquels nous avons du faire face et qui demeurent ; Les repères que nous croyions immuables et solides et qui nous apparaissent comme vacillants, remis en question, détruits. ..
L’événement traumatique peut être récent, nous l’avons vécu il y a peu et depuis une souffrance et des symptômes réactionnels sont apparus. Dans ce cas une prise en charge le plus rapidement possible permet d'abraser les symptômes réactionnels et de pouvoir se sortir de cet état. Cette prise en charge rapide empêche également toutes les pensées inconscientes ( mais agissantes) de s'installer et de s'enkyster car elles risquent d'être génératrices de symptômes à distance de l'événement et de fragilités à plus long terme.
L'événement traumatique peut ( ou ils peuvent car il y a aussi un phénomène d'accumulation notamment dans l'enfance ) également être très ancien. Ils ont été enfouis, comme cachés tout au fond de nous.
Nous vivons avec depuis. Parfois nous les avons oublié, parfois nous en gardons la mémoire mais en avons minimisé la portée, la charge sur notre vie et notre personnalité.
Nous nous sommes construits avec, chacun à notre façon : pour y échapper, pour s'en défendre ou se défendre des effets et des pensées qu'ils avaient fait naître en nous il y bien longtemps, pour nous réparer, pour les conjurer.. .
Seulement quelque chose dans notre vie présente, un événement, vient les réactiver. Cet événement peut être violent, brutal avoir une charge en tant que tel, mais parfois ce n'est pas le cas. Il pourrait même sembler aux yeux et aux oreilles non avertis, anodins, ou " pas grave". Parfois il ne s'agit pas d'un événement mais d'une situation qui se produit ou se reproduit dans un autre champ , au travail par exemple.
L'événement , la situation vient faire écho à ces traumatismes anciens enfouis. Il les rappelle, sans que nous puissions nous en rendre compte, ni faire le lien. Ce rappel vient en réactiver les douleurs, les blessures et les effets. Nous nous mettons alors à nous sentir mal, à en souffrir profondément sans comprendre que cette souffrance n'est pas uniquement celle du présent mais également celle du passé, celle de toute une vie. C'est d'ailleurs pour cela que cette souffrance est si profonde et si intense.
En quoi consiste la prise en charge psychique ?
Dans un premier temps et pour les événements récents il y a un travail de "debriefing" qui permet de sortir de la sidération. Ce travail peut se déplier sur une ou plusieurs séances selon les cas et les besoins. Il s'agit là d'un travail guidé accompagné par le savoir-faire et les interprétations du psychologue. Une reconnaissance de ce qu'on a vécu, de ce qui nous est arrivé et de ce qui nous a traversé.
Ensuite il ne s'agit pas seulement de se reconnaître comme victime mais de s'en sortir. Aussi injuste puisse être ou avoir été la situation, surtout lorsqu'il y a phénomène d'accumulation, c'est à nous de faire cette démarche de soin, soutenus guidés et accompagnés bien sur. Une démarche de travail et de soin pour ne plus être victime plus encore de ce que nous avons subis, pour ne plus être agis et dirigés par les événements violents et douloureux de notre vie ou de notre histoire. Une démarche pour affirmer des choix qui ne soient plus en réaction ou en défense à ce que nous avons vécus et dont nous craignons le retour. Un cheminement pour trouver qui nous sommes au delà de la souffrance, des symptômes vers la cicatrisation.
afin de pouvoir écrire la suite ou une tout autre nouvelle histoire.
